focus Le débat dépassionné est donc essentiel ? Oui ! La confusion totale liée à l'ignorance et la crainte pose problème aujourd'huiNous sommes là pour discuter, mettre en perspective les choses, mais c'est très dur dans ce monde de l'immédiateté où les médias jouent sur les effets d'annonce. Il faut donc faire un travail pédagogique, malheureusement contré par les groupuscules anti-genre (Alliance Vita...etc.) qui jouent sur l'affect et la passion, eux. Quel est l'âge le plus critique ? [adolescence. S'il n'y a pas d'ouverture maximale, les ados restent sur le modèle ancestral qui prétend que le sexe est un besoin physique de l'homme comblé par la femme. On a noté que dès la classe de 3e les filles s'imposent elles-mêmes des limites. Elles choisissent, spontanément, des domaines d'études en sciences humaines, psycho... Se disant, à tort, que les matières scientifiques ne sont pas pour elles. Le but ? Aboutir à une société plus juste où chacun se respecte, s'épanouit indépendamment de son orientation sexuée, accepte l'autre, est ouvert Cela permettrait aussi de faire baisser les violences faites aux femmes. Si on continue de voir la sexualité de l'homme comme un besoin que la femme doit assouvir, alors il y aura toujours autant de viols et d'agressions. Quel est le meilleur âge pour cela ? Tous ! C'est mieux si on intervient tôt. Jusqu'à 2 ans, l'enfant ne sait pas s'il est fille ou garçon. C'est son entourage qui agit en fonction de son sexe. Il faut alors déconditionner les adultesDe 2 à 5 ans, les enfants construisent leur identité sexuée, en imitant l'adulteOn doit les laisser faire, les laisser jouer ensemble, favoriser la mixité. À 6-7 ans, ils restent entre sexes, et entrent dans la représentationLà, il faut travailler sur les images, répondre à leurs interrogationsC'est l'âge où l'on prend conscience du jugement des autresLes adultes ont alors peur du regard de la société sur l'enfant, il ne faut pas, il faut laisser ouvert le champ des possibles. C'est plus facile pour les filles, car elles sont déjà dévalorisées. Les revaloriser est primordial afin que les garçons acceptent et accèdent à leurs jeux, sans se sentir pour autant rabaissés, voire humiliés. Ils n'ont pas le droit de jouer à la poupée, de pleurer, d'être faible... Quelle ânerie ! Enfin, chez les adolescents, le sexe est la question centrale. Or l'éducation sexuelle n'est pas faite., 4 l'école, on n'évoque que la prévention et la reproduction, et les parents ont du mal à discuter sur le sujet Jamais on ne parle aux ados du sexe sous son aspect plaisir, relation avec l'autre. Résultat, ils filent vers le porno. L'âge moyen du visionnage du premier film porno est 13 ans ! Comment détruit-on les stéréotypes ? Je fais des parallèles avec le racisme ou je demande a tu n'as jamais été confronté à une injustice dans ta vie ? u Il faut aussi inverser les rôles, parler aux gens de leur enfance, faire émerger des choses de cette période, qu'ils se souviennent de ce qu'ils ont vécu, ressenti alors. Il faut questionner leurs représentations. Mais aborder l'identité sexuée c'est toucher au très intime, c'est donc très complexeQue pensez-vous de l'abandon de l'ABCD de l'Egalité ? Quel dommage ! Car il y a là du boulot, les enseignants sont inconsciemment conditionnés, comme nous tous. ABCD ou pas, ce qui m'importe c'est la prise de conscience de l'égalité à tous les niveaux, de la crèche à la fac, qu'elle soit au coeur de l'éducation, de la société, des mentalités. Que tous les intervenants soient formés, que l'on travaille sur les stéréotypes, à des jeux sur les métiers avec les enfants, des jouets mixtesOn doit former les enseignants et leur fournir des outils afin que cela fasse partie de leur quotidien, soit au centre de leur enseignement. Les manuels scolaires doivent être revus, mais aussi la littérature jeunesse, et toute la culture. L'effort doit être fait pour mettre en valeur des figures féminines en littérature, en histoireCette année, au brevet des collèges, les élèves ont eu un texte de Charlotte Delbo ! Ce sont les enseignants qui l'ont choisi, ce qui prouve qu'ils sont des tètes de pont. L'égalité des sexes est une fragile révolution, balbutiante et remise en cause. Il faut y travailler à tous les niveaux de la société, à tout instant. Septembre 2014/yeggmag.fr I 20 |