Tricot Journal n°60 15 nov 1936
Tricot Journal n°60 15 nov 1936
  • Prix facial : 1,75 F

  • Parution : n°60 de 15 nov 1936

  • Périodicité : bimensuel

  • Editeur : R. Vial

  • Format : (220 x 300) mm

  • Nombre de pages : 20

  • Taille du fichier PDF : 22 Mo

  • Dans ce numéro : ensemble sport pour jeune fille.

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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toujours les enfants, comme la camériste, redoutaient de voir surgir devant eux. Dick finit par prendre un intérêt véritable à la recherche de cet être dont personne ne savait rien et que tous autour de lui redoutaient. Habilement, se souvenant des résultats hettreux de ses débuts dans la carrière de policier, il se mit à la recherche de l'étranger, s'appliqua d'abord à le rencontrer, mais on eût dit qu'averti par un secret pressentiment, l'autre était résolu à se dérober. Alors le mari de Thérèse prit un autre système. Avec un tact, une prudence dignes des plus avisés détectives, il commença par interroger les voisins, puis les fournisseurs. Il ne tarda pas à apprendre qu'à cinq cents mètres de sa propre villa et dans un endroit plus désert, habitait. un homme d'allures bizarres, sur le compte duquel personne ne pouvait rien dire, car cet homme vivait en sauvage, n'avait pas même de domestique et ne sortait guère de sa maison que pour faire quelques achats dans la région, ou se rendre, toujours seul, dans la forêt. Il semblait jouir d'une certaine aisance, payait comptant les moindres emplettes et sa villa était louée pour dix ans A force de subtilité, Dick arriva à savoir le nom de l'homme. Il prétendait s'appeler Victor Bertrand. mais de vagues soupçons planaient sur sa véritable identité. Bien qu'il eût un jour déclaré à la buraliste qu'il était originaire du - Nord, il gardait un terrible accent méridional, et comme la buraliste elle-même avait vu le jour à Marseille. elle déclarait qu'elle ne pouvait se tromper sur le lieu de naissance de Bertrand. S'il n'est pas de mon pays de Provence. il est probable qu'il y a longtemps vécu car on ne me trompe pas sur le parler de chez moi, disait-elle, dans un large sourire, montrant ses dents éclatantes. Tout cela est bien curieux. pens'a Dick. Insensiblement, ses aspirations policières se réveillèrent. A l'étude, ses collègues remarquèrent qu'il devenait extraordinairement distrait depuis quelque temps. Il n'avait plus le même goût aux choses de son métier, devait souvent être rappelé à l'ordre par son patron, qui cependant continuait à se montrer plein d'une indulgence paternelle pour ce grand garçon, dont mieux que personne il appréciait les indisc.utables qualités. Un matin, pourtant, il se décida à faire vomparaffre son clerc devant lui. - Mon cher garçon, je tiens à vous dire que votre lattitude m'inquiète. - Pourquoi, Maitre. N'ai-je pas constamment rempli les tâches que vous attendiez de moi ?... - Parfaitement, au contraire, l'étude n'a rien à vous reprocher. - Alors ?... - Alors mon bon Frédéric j'ai idée que le détective qui sommeille en vous est en train de suivre une nouvelle piste et qu'un jour ou l'autre vous allez encore me demander un nouveau congé. — Peut-être ! En tout cas, mon cher Maître, soyez certain que je ne tenterai rien sans vous avoir consulté. Prenez garde ; à force de vous amuser à ce petit jeu, il pourrait bien vous en cuire. Si une nécessité absolue ne vous oblige pas à vous mêler des affaires des autres, restez tranquille. Vous avez une femme exquise, -de charmants enfants, une jolie tortune, pourquoi vous tourmenter d'autre chose et troubler une vie que bien des gens vous envieraient ? Dick sentait toute la sagesse de ces paroles. Oui, le notaire avait raison, mais comment cet homme sédentaire pour qui le monde commençait et finissait au milieu de ses dossiers eût-il compris ce besoin d'aventures, cette curiosité ardente qui guide la conduite de certains êtres et représente la joie suprême de ceux qui sont nés policiers. Depuis que Dick avait connu l'existence de l'homme de la forêt, une sorte d'instinct le poussait à reprendre ses recherches, à lui faire entreprendre ses investigations autour du mystère qu'il Le mystère existait, il en avait la conviction et en fut encore plus persuadé quand Rose lui avoua qu'elle aussi avait enquêté dans le voisinage. Un à un les fournisseurs avaient parlé. Elle savait maintenant que celui dont toute la maison s'occupait avait reçu le nom de l'Homme mystérieux. Dick pensa  : — Il est heureux ma foi qu'aucun crime ne soit commis dans notre région. Tous les soupçons se porteraient immédiatement sur ce personnage. L'OMBRE QUI RODE De plus en plus, s'ancrait. en lui la pensée que l'inconnu se cachait dans ce coin de France, qu'il n'y était venu que pour se dérober aux.griffes de la justice. — J'en aurai le coeur net, décida-t-il. Sans en rien dire à Thérèse, il commença par étudier les allées et venues de l'étrange voisin. Il apprit qu'il recevait régulièrement des lettres, soit de Provence, soit de Dordogne. Et voici que dans l'esprit subtil de Dick, un soupçon aussitôt naquit. Thérèse possédait dans ces deux contrées des parents qui jadis avaient tout tenté pour lui ravir l'héritage que lui avait laissé un oncle établi au Canada. -Existait-il une corrélation entre ces faits ? L'inconnu faisait-il partie de la bande rapace, attachée à la ruine de Thérèse ?... Ah ! se disait Dubois, si je parvenais seulement à avoir entre les mains une de ces lettres... Mais rien n'autorisait le jeune homme à s'en emparer. Qu'avait-on à reprocher à celui dont pour l'instant toute la faute semblait. consister à refuser de fréquenter ses semblables ? N'était-il pas libre, d'organiser son existence à sa guise, cet homme, sur lequel aucun soupçon valable ne pesait. Vraiment je suis fou, se disait parfois Dick, quand son imagination le tourmentait trop, cet être ne m'a rien fait, qu'ai-je donc contre lui, quelle force nie pousse à m'occuper de son passé ?... Pourtant le démon qui était en lui ne s'endormait point, il se sentait repris de la même fièvre qui, quelques années plus tôt, l'avait enflammé alors qu'il recherchait la trace des misérables résolus à ruiner Thérèse. Une fois encore le hasard vint à son aide. C'était le soir. Contrairement à son habitude, il avait laissé sa voiture au garage et. revenait par le train. Comme il marchait sur la route conduisant, de la gare à la villa, il aperçut l'homme sortant du bureau de poste et pénétrant dans un sentier de la forêt. Il tenait en mains une lettre. Ne se sachant pas observé il se hâta de déchirer l'enveloppe. Comme il dépliait la feuille, un brusque coup de vent emporta son chapeau. Tandis qu'il se baissait pour le ramasser. une rafale plus violente lui arracha des doigts la précieuse lettre et le papier s'envola. Avant qu'il ait pu la rattraper, Dick plus jeune, plus agile aussi avait bondi et s'était emparé de la missive. Il s'empressa de la rendre au destinataire. mais pas assez vite pourtant pour que les premières lignes sur lesquelles il venait de jeter les yeux ne lui eussent fourni une partie des renseignements qu'il cherchait. Il avait lu l'entête de la lettre, savait à présent que l'expéditeur écrivait d'Aix-en- Provence, mais d'autres mots l'avaient frappé.l.a lettre en effet commençait ainsi  : - Mon cher Victor, Inutile de menacer. Vous ne pouvez rien contre nous et nous pouvons tout contre vous-même. Le reste avait échappé à Dick qui ne pouvait prendre le temps de lire davantage, mais pour l'instant le peu qu'il avait vu suffisait — Plus de doute, se dit-il, cet homme est lié à la bande. J'aurai le fin mot du mystère. De cette minute, son parti fut pris. Il n'avait besoin d'aucune aide, se ferait. à nouveau détective, trouverait à confondre le coupable si véritablement, comme tout le lui faisait supposer, l'homme avait. sur la conscience quelque ancien crime, ignoré de tous. Dick, en réfléchissant, se disait  : Décidément je crois que le notaire a raison, j'ai manqué ma vocation ; je sens bien que jusqu'à ce que je sois arrivé à déchirer le voile de cette existence, je n'aurai plus une minute de tranquillité. Le lendemain, avant de se rendre à l'étude, Dubois alla rôder aux abords de la maison où vivait l'étranger. Octobre touchait à, sa fin et le jour se levait tard. Un léger brouillard couvrait la campagne. Tout semblait - dormir autour du logis. Prudemnient, Dick fit le tour de la demeure. Tous les volets demeuraient hermétiquement clos. Il semblait que la porte même ne dût jamais devoir s'ouvrir, tant l'abandon et la tristesse pesaient sur les choses. Le jardin négligé, les arbres probablement.jamais taillés, les nombreuses lézardes de la façade, tout, jusqu'au toit dont plusieurs tuiles menqua'ent disaient l'indifférence absolue du locataire pour ces lieux où il passait pourtant la meilleure partie de ses jours. Dick ne se contenta point d'une simple inspection. Avec une dextérité remarquable, s'aidant des p'eds et des mains, il parvint à grimper sur un balcon donnant. sur le derriere de la maison. Bien ne bougeait. Enhardi par sa réussite, it tenta de pousser doucement les persiennes. A sa grande surprise, elles cédèrent. Les vitres n'étaient pas fermées. Retenant son souffle, amortissant le bruit de ses pas..1 (policier improvisé traversa le vestibule, gagna les pièces les plus proches et partout trouva la même négligence, le même désordre. le même manque absolu de confort. Celui qui vivait là n'avait sans doute aucun souci d'embellir son logis ni de le rendre présentable. Dick jugea quil se terrait dans ces murs comme un animal dans sa tanière. — J'en ai vu assez pour aujourd'hui. décida-t-il, partons maintenant. avant que l'hôte ne s'éveille, je vois qu'il est facile de s'introduire chez lui. Une autre fois j'en saurai davantage. Et sûr à présent de ne rien risquer, il s'en alla aussi tranquillement qu'il était venu. Résolu à cacher cette visite à Thérèse. il se rendit à l'étude comme de coutume. mais un remords le tourmentait. Il était. trop intelligent, surtout trop au courant des articles du Code, pour ignorer qu'il se mettait dans un mauvais cas en pénétrant ainsi chez un homme auquel. jusqu'ici, personne n'avait rien à dire. Qu'on le surprit en train d'escalader le balcon de l'inconnu et c'était lui qui serait le coupable. Cependant sou Flair le guidait. Il demeurait convaincu que l'existence de l'homme mvstér eux cachait un secret terrible. LA LETTRE ÉNIGMATIQUE Après une journée d'inquiétude. il lm y put tenir, et le soir avant de quitter le bureau, il se décida à aller consulter son patron. Le notaire poussant de côté les papiers qu'il était en train de lire, posa son coude sur la table et se prépara à écouter la confession de son clerc. Dès les premiers mots prononcés par Dick, le tabellion l'arrêta. Ah ! ça, mon garçon, êtes-vous devenu Cou ?... Qu'est-ce que cette histoire ?... Savez-vous que vous venez de vous rendre coupable d'une véritable effraction ?... Et c'est vous, un homme que -je croyais sérieux, qui ne craignez pas de vous lancer dans une aventure invraisemblable. sut de simples indices. poussé seulement par vol re qx1raordirmairv int:1011 ; 114w
Maitre ! je vous jure que je suis sur une piste intéressante. Je suis sûr que l'homme que je poursuis est un criminel. Mon garçon, vous commencez à ! n'inquiéter très sérieusement. Voulez-vous un conseil ?..- Certes ! - Eh bien, grâce à votre père qui occupe une situation honorable dans la magistrature, vous n'êtes pas sans être connu à la Sûreté générale. Allez trouver ces Messieurs, contez-leur votre petite histoire, faites-leur part de vos craintes et l'on mettra un homme capable à votre disposition. Le Mystérieux, comme on le nomme, sera adroitement surveillé et si vraiment vos soupçons sont fondés la police aura vite fait de s'en rendre compte. Ainsi votre personne restera à l'abri de tout reproche et vous ne risquerez pas de faire encore quelque folie, qui m'obligerait à Me priver désormais de vos services. ce qui me serait, je l'avoue, particulièrement pénible. — Maitre, vous ne parlez pas sérieusement ?.. — Très sérieusement. - Donnez-moi le temps de la réflexion. — C'est tout réfléchi : ou vous renoncerez à votre hasardeuse poursuite, ou vous quitterez l'étude..le veux un clerc et non un Sherlock Holmes auprès de moi. On ne peut jouer impunément les deux rôles. — C'est bien, Maître, je vous obéirai. - Je n'attendais pas mieux de votre sagesse. Il se retira l'esprit troublé et le cœur en détresse. Ainsi, il faudrait renoncer à découvrir le mystère ou bien confier aux policiers une mission que sa nature entreprenante le poussait à remplir seul Et dans son for intérieur, il se (lisait que ce n'était pas en vain qu'il avait souhaité connaître le passé de cet homme. Un Pressentiment qu'il ne pouvait expliquer lui ordonnait de ne se fier à personne pour mener à bien la tâche commencée il lui semblait qu'un lien inattendu Mêlait l'étranger à leur propre existence. Quelle ne fut pas sa surprise en pénétrant ce soir-là dans la jolie salle à manger où sa femme et ses enfants l'attendaient, de voir Thérèse agitée d'une émotion extraordinaire. Elle si calme d'ordinaire, elle dont le doux visage aux traits réguliers mettait auprès de lui une atmosphère si reposante, montrait à présent un visage bouleversé et tout dans son attitude révélait le trouble auquel elle se trouvait en proie. A peine répondit-elle aux questions qu'il lui posait. Au dessert, elle pressa les enfants, les envoya dans leur chambre malgré leurs prote'stations. Dès qu'ils eurent disparu, elle parla  : — Dick, il arrive une chose assez curieuse. Pourquoi eut-il aussitôt l'impression que sa femme allait l'entretenir de l'homme mystérieux ? Ii v a ainsi dans la vie des êtres des heures où se'révèlent à nous, du plus profond de notre inconscient, des choses que les plus habiles d'entre nous seraient fort en peine d'expliquer. Dick traversait une de ces "minutes. Il prononça  : — Dis-moi tout, Thérèse. Voilà, il arrive une histoire stupéliante. Il l'interrompit pour questionner  : Il s'agit de l'homme mystérieux ? — Comment as-tu deviné ?... - Je ne sais pas, continue. Eh bien, lu connais nos petites habitudes, à Madeleine et à moi. En attendant que les mauvais jours nous en empêchent, nous avons coutume de faire un tour en forêt avant le déjeuner, en compagnie des enfants. - Oui, continue, - Or, ce matin, je vois Madeleine venir chez moi avec une figure toute drôle. Je ne t'en ai jamais parlé, niais je t'avoue que l'inconnu dont la vue a si fort troublé nos petits nous occupe petit-être uu peu plus qu'il lie faudrait. Sans que nous le voulions, son nom revient presque chaque jour dans nos entretiens et cela devient une espèce de suggestion. Twcomprendras donc ma surprise et aussi mon émotion quand Madeleine, qui venait me prendre, me dit à brûle-pourpoint  : -'l'hérèse, ne m'as-tu pas dit que tes fameuses cousines, celles-là même qui avaient essayé de capter l'héritage de ton oncle. habitaient Mirande en Périgord ? Mais oui, pourquoi me demandes-tu cela ?... Alors Madeleine me tend une enve loppe cachetée, —Le facteur s'est trompé tout à l'heure dans la distribution'du courrier. Il m'a remis la correspondance de cet homme. J'allais tout de suite lui renvoyer ses lettres, quand j'ai jeté les yeux sur le timbre de l'une d'elles. Le nom de la ville m'a frappé..le te porte l'enveloppe avant de la rendre au destinataire. Et alors ? demanda Dick haletant... - Alors, mon ami, j'ai regardé moi aussi et non seulement j'ai reconnu que la lettre portait bien le timbre de Mirande, mais bien mieux.., l'écriture était celle de la cousine Émilie à qui ma mère et moi avons dû tant de tracas.. Parfait ! Qu'as-tufait de cette lettre ? La voilà, répondit la jeune femme, je t'ai attendu pour savoir ce qu'il fallait. décider. Tu as fort bien agi, ma Thérèse. Cette lettre, vois-tu, va probablement nous éclairer sur le mystère qui plane sur ce vilain personnage et qui sait... Elle te touche sans doute plus que tu ne crois... - Que veux-tu dire ?... - Rien encore, l'avenir m'apprendra si mes soupçons sont fondés. En attendant, je vais aller immédiatement remettre son courrier à ce Monsieur, et j'imagine que comme entrée en relations rien ne pouvait m'être plus favorable. Comment te recevra-t-il ? - Très bien je l'espère. En tout cas ne crains rien, je vais prier Pierre Beaulieu de m'accompagner jusqu'à la porte et de m'attendre. Tu te méfies donc... tu vois bien que j'ai raison de me tourmenter. Non, chérie, il ne le faut pas, je suis seulement prudent et reste certain que l'ogre ne me dévorera pas. Il partit donc à la recherche de son camarade et bientôt tous deux se trouvèrent devant la grille de la villa de Victor. DANS LA GRIFFE DU RENARD Comme le matin, la grille n'était pas fermée, Pierre pénétra avec Dick dans le jardin tandis que ce dernier allait souiller à la porte du logis. Personne ne répondit. Alors Dick frappa de toutes ses forces. — Qui est là ? dit enfin une voix venant de l'intérieur. Un voisin. Que me veut-oui ? — Simplement vous remettre une lettre qui s'est trompée d'adresse. La porte s'entrebâilla et malgré la résistance du locataire, Dick lui imprima une si forte poussée qu'elle s'ouvrit tout. entière, lui livrant passage. — Mon Dieu, Monsieur, fit Dick en riant, de qui avez-vous donc peur pour faire tant de façons à accueillir un visiteur sans mauvaise intention ?... - Je n'ai peur de personne, grogna l'autre, mais sur ses traits soudain palis, une si folle épouvante se lisait que Dick eut pitié de lui. - Allons, voisin, remettez-vous. Voici une lettre que le facteur a par mégarde confondue avec d'autres et je vous la rapporte, nia visite n'a pas d'autre but. L'homme prit l'enveloppe. Ses mains tremblaient si fort qu'il ne parvint pas tout de suite à la prendre. Mais par un effort de volonté il se ressaisit et poliment  : Excusez-moi prononça-t-ii, je vis seul en sauvage, j'ai perdu l'habitude de la société et vous savez, à 01011 âge on se méfie... Mais entrez, Monsieur, et asseyez vous un moment. - Le hasard nie sert, pensa Frédéric, je vais donc enfin connaître les aîtres. - Peutêtre découvrirai-je quelque chose propre à me mettre sur la trace de ce que je cherche. Tandis que l'hôte le précédait dans la salle à manger où régnait le plus abominable désordre, Dick décidé à brûler ses vaisseaux, osa demander  : - - A propos, j'ai sans le vouloir vu le timbre de la lettre, auriez-vous par hasard des parents à Mirande ?1'y ai moi aussi de la famille... De la famille, fit l'autre, et qui donc ? Les dames Loriot. L'homme bondit, Vous connaissez les dames Loriot ? — Puisque je vous dis qu'elles sont mes cousines ?... Mais je vois qu'elles ne vous sont pas étrangères. Victor comprit sa sottise. Se dominant il déclara  : - Non, je ne les connais pas., l'ai seule ment entendu parler d'elles par des amis. Dick maintenant était renseigné. De plus en plus e fixait dans son esprit l'idée que celui qu'il avait devant les yeux avait joué un rôle dans le drame de la famille de Thérèse. — Je saurai tout, se promit-il. Oui eût dit qu'une main cachée, conduisait les événements au gré de Frédéric. Deux jours plus tard, Rose, tout essoufflée, accourait vers sa maîtresse. - Madame, l'homme qui a fait peur aux enfants vient de rouler sous un camion. Oui l'a transporté à l'hôpital, il paraît qu'il a une jambe arrachée. - Pauvre vieux, soupira'l'hérèse émue malgré elle. Il n'a sans doute personne autour de- lui. — Je ne crois pas. En tout cas, il n'a pas perdu connaissance en tombant et ses premières paroles ont été pour ordonner qu'on le ramenât chez lui, mais oui n'a pas voulu l'écouter. Quand Dick apprit l'accident, il se promit d'aller voir le blessé. Peut-être sous l'influence de la faiblesse, le coupable, c'était lui, parlerait-il... Ce ne fut que quarante-huit heures plus tard que le mari de Thérèse obtint l'autorisation d'aller prendre des nouvelles de son étrange voisin. L'infirmière l'introduisit dans une salle où plusieurs lits étaient alignés. Oui n'avait point fait à l'inconnu l'honneur de lui dominer une chambre particulière. Dick fut donc un moment sans le distinguer des autres malades couchés près de lui. Enfin, il aperçut la face rude, les sourcils broussailleux et les yeux inquiétants de celui qu'il désirait rencontrer. Le blessé ne manifesta aucune surprise de sa visite, le reçut même avec une politesse à laquelle Dick était bien loin de s'attendre. — Il va aussi bien que possible, déclara l'infirmière, mais c'est l'heure où la morphine va agir, ne restez pas trop, Monsieur. - Souffrez-vous beaucoup ? demanda Dick. J'ai eu tous les diables de l'enferdans ma jambe, mais depuis un moment. je ne sens plus rien. Et pour affirmer son dire, le blessé partit d'un éclat de rire. La morphine, murmura tout bas l'infirmier. L'homme commençait à s'agiter. Au rire de tantôt, succédaient les larmes. Tout à coup, il essaya de se dresser sur ses oreillers, ses regards eurent un étrange éclat et d'une voix épouvantée, il cria  : Là ! là, à son bureau, je le vois ?... Qui ? demanda Dick avec douceur. Le mort 1 celui que j'étais venu chercher pour l'inviter à boire avec moi' ?... Le coeur de Dick se mit à battre. Domptant son trouble, il poursuivit  : Oui, oui, je sais, votre victime. n'est-ce pas ?... L'homme regarda avant de répondre. — Oui, ma victime, celle que l'on m'avait désignée. Il est venu, il a bu et la poudre était bien fondue, il ne s'est douté de rien, il est retourné à sa banque et il est tombé. A sa banque ? balbutia Frédéric... Oui et depuis il nue poursuit. On le



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