10 | CONFIDENCES VéRONIQUE FAUCONNET Dominique Sander-Emram Si une chute malencontreuse ne l’avait pas contrainte à se (re)poser, Véronique Fauconnet occuperait, « arpenterait » serait une plus juste expression, comme à son habitude et pour notre plus grand bonheur, la scène du TOL. Toujours en mouvement, vive, drôle, fragile aussi, animée d’un enthousiasme éclatant, elle a pour son métier d’actrice et de metteuse en scène une passion dévorante qu’elle partage volontiers. Confidences d’une amoureuse des planches. Véronique, vous avez toujours voulu être actrice ? Disons plutôt que j’ai, très tôt, été fascinée par la scène ; plus qu’actrice, enfant je me rêvais danseuse, classique évidemment ! Voir évoluer des gens sur les planches m’enchantait ! Je crois bien que j’ai gardé cette capacité d’émerveillement total, à la fois en tant que spectatrice et comme actrice. Adolescente, je me cherchais : j’ai commencé par la musique, mais très vite j’ai réalisé que je n’avais pas de réel talent. Le goût que j’ai développé pour le théâtre remonte peut-être à mes années d’école primaire en France, à Villejuif, où l’enseignement très avant-gardiste laissait beaucoup de place à l’expression artistique. J’ai ensuite vécu à Luxembourg où ma mère avait déménagé. J’ai connu là une longue période de repli sur moi en raison d’une grande timidité. Après des études de Lettres à la Fac à Metz, que je trouvai abstraites, j’ai eu envie de renouer avec mes aspirations et de suivre des cours d’art dramatique. La chance m’a souri. Lors d’une journée portes ouvertes au Conservatoire, je me suis présentée en retard aux inscriptions, mais la chance a voulu que ce soit Marc Olinger, directeur du théâtre des Capucins et directeur artistique du TOL qui enregistre les demandes. Il m’a donné l’opportunité de pouvoir essayer. Vous avez alors attrapé le virus ? Oui, à l’évidence ! Marc Olinger a su me faire naître à moi-même et trouver comment oublier ma timidité. Quatre mois après mes débuts, il me proposait de jouer au théâtre des Capucins dans une pièce de Jean Genêt, Le balcon. On était en février 1987 et le théâtre avait ouvert ses portes l’année précédente. C’était une énorme production qui mobilisait 15 personnes. Ce fut un très grand succès : la pièce a tenu deux saisons. En octobre de la même année, je jouais dans Le roi des cons de Wolinski au TOL. Après, tout s’est enchaîné et je n’ai plus cessé de jouer. Je suis devenue membre du TOL ce qui signifiait être femme à tout faire du théâtre comme tous les autres acteurs. Quand on ne jouait pas, on repeignait la façade, on servait au bar, on s’occupait de la technique… C’était le « système Olinger » qui a su créer un esprit de groupe, une troupe théâtrale au vrai sens du terme. Qu’en avez-vous retenu ? Une certaine humilité. Le métier d’actrice évoque les lumières et les paillettes, un métier qui brille. J’étais la plus jeune de la troupe et très rapidement j’ai rencontré le succès. Peindre les murs du théâtre m’a permis de garder les pieds sur terre. Le TOL n’a rien d’un théâtre prestigieux, mais je l’adore. Et puis, il faut bien l’admettre, Luxembourg n’est pas Paris ou Broadway. Nous avons ici la possibilité d’avoir jusqu’à quatre contrats par an, c’est formidable. A Paris, ce serait absolument exceptionnel ! Vous ne regrettez pas de ne pas jouer à Paris ? Pas du tout ! En fait, je crois que je n’ai jamais eu les dents assez longues pour même essayer. Je suis très attachée au Luxembourg. J’y ai eu la chance de rencontrer des professeurs qui m’ont guidée : Marc Olinger, Claudine Pelletier, Philippe Noesen mais aussi des partenaires de jeu qui m’ont montré la voie comme Claude Frisoni, mon grand frère de théâtre et l’auteur que j’ai le plus joué. Dans un petit théâtre, on s’imprègne de l’atmosphère de la salle. On entend les soupirs, les rires, on est au plus près des réactions des spectateurs. C’est une expérience fantastique. |