hommage Salut l’artiste… Texte E. Ratouis Photos Y. Ballu et G. Kosicki Ce qui vient d’abord à l’esprit quand on pense aux premières images que Patrick Edlinger Dans La Vie au bout des doigts, au-delà des images spectaculaires rendues encore plus dramatiques par le caractère lancinant de la musique, c’est cette quête d’harmonie, ce besoin de simplicité et d’économie des moyens, d’authenticité qui attire l’attention, qui nous séduit et qui finit par nous fasciner. Dans la symbolique des prénoms, Patrick signifie le « battant », celui qui a beaucoup à prouver. Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il s’est battu Patrick dans l’entraînement en suivant dès l’âge de 18 ans son compère et maître des débuts, Patrick Berhault qui avait à cette époque une longueur d’avance dans sa manière de conduire sa vie à 100 à l’heure. C’est auprès de lui dans les falaises du Verdon qu’il découvrit l’ivresse redoutable des solos ainsi que d’une vie vraiment libérée des contraintes sociales. C’est grâce à lui qu’il acquit la notoriété, car c’est par son intermédiaire qu’il rencontra le cinéaste Jean-Paul Janssen, qui le choisira lui, le disciple. De ce quiproquo, il restera toujours une forme d’ambiguïté entre les deux hommes devenus rapidement deux alter ego. C’est du reste probablement cette rivalité non officiellement dite, ce regret non exprimé, qui conduisit Berhault sur le tard à chercher au prix de sa vie cette reconnaissance qui lui était promise et qu’il n’avait pas eu dans sa jeunesse. Le paradoxe de Patrick Edlinger, qu’il n’a probablement pas bien vécu, du reste, c’est justement cette notoriété soudaine qui le propulse en tête du palmarès des personnalités préférées des français. Comment concilier les deux ? Comment rester pur, fidèle à son éthique et vendre des barres Grany, comment fréquenter les plus grands plateaux télés, sourire à Drucker et rêver de se promener dans La traversée sans retour dans les Calanques ? « L’essentiel était la compétition avec lui-même » Pour faire durer le mythe naissant de La Vie au bout des doigts, Patrick s’assura très vite les services d’un grand photographe d’escalade, Gérard Kosicki. Ainsi ses sponsors pourraient avoir la matière première qu’ils recherchaient. Pour autant, il est clair qu’il refusa bon nombre d’opportunités fort juteuses parce qu’elles ne lui convenaient pas. Durant la période de sa grande exposition médiatique, le prix à payer pour sa liberté et son confort était le suivant : pendant 5 mois par an, il devait faire face à ses engagements de conseiller technique et autres. Le restant de l’année, il était libre de grimper, de voyager, un prix qu’il jugeait fort raisonnable ! De quoi entretenir l’envie chez les envieux ! Son approche de la compétition fut également paradoxale. Il y était plutôt hostile. Mais, à la différence de Berhault, Edlinger ne signa pas le Manifeste des 19 contre cette pratique qui n’avait pas de sens pour lui. L’essentiel était la compétition avec lui-même, pour parvenir à pousser ses propres facultés si loin qu’il pouvait jouir de la sensation d’avoir dépassé ses propres limites. Cela se produisait en ouvrant ou en répétant une ligne qui se situe à la frontière des possibilités de l’homo sapiens de son temps : Ça glisse au pays des merveilles, deuxième 8a français en 4 |