Le Bonheur est en vous corps, et elle ne se caractérise pas uniquement par déplacement et quantité de flux en nous, elle est aussi rendue visible par un physique particulier de l’homme : « veines saillantes », maigreur. Il y a sous l’effet du vin ou de la bile noire, changement de manière d’être selon la quantité bue ou le mouvement et le mélange de la bile, c’est-à-dire suivant les variations de la chaleur. Si Aristote prend l’exemple du vin c’est parce qu’il modèle les caractères comme le mélange de la bile noire. Il peut produire tous les états de personnalité et cela graduellement selon la quantité absorbée. C’est d’une expérimentation simple, quotidienne, à la portée de tous, dont se sert Aristote pour nous faire comprendre à quoi peut ressembler l’état du mélancolique, même si l’effet du vin est passager, artificiel, alors que l’homme est mélancolique par nature et à vie. En ce sens, Aristote a soin de préciser : « Le vin, […] crée l’exception chez l’individu non pour longtemps, mais pour un court moment, tandis que la nature produit cet effet pour toujours […]. » Ces descriptions d’états les plus extrêmes qui peuvent pousser au suicide mettent en garde l’homme mélancolique afin qu’il prenne soin de sa santé, même si Aristote n’établit pas comme Ficin les remèdes à suivre. Ce qui compte dans ce texte, c’est non pas la Si Aristote prend l’exemple du vin c’est parce qu’il modèle les caractères comme le mélange de la bile noire. Il peut produire tous les états de personnalité et cela graduellement selon la quantité absorbée. quantité de vin bue ni le vin lui-même, mais plutôt les effets sur les comportements, et manières d’appréhender les choses, les variations et gradations du caractère. J. Pigeaud nous dit que « l’efficacité du vin s’explique par 10 Philosophie pratique ce que l’on pourrait appeler une physique. C’est parce qu’il contient du vent [de l’air comme nous avons dit précédemment] qu’il produit ces effets ». L’exemple du vin permet d’éclairer non seulement la constitution et la nature venteuse de la bile noire, mais aussi les effets en l’homme. Nous avons dit qu’elle pouvait être froide ou chaude, et les deux en extrême, elle est donc instable, inconstante par nature, c’est pourquoi le mélancolique l’est aussi. Elle est variable selon son mélange, nous ne savons pas si Aristote fait ici référence au mélange de la bile noire avec les autres humeurs puisqu’il ne les mentionne nullement, ou s’il fait état d’un mélange variable du chaud, du froid, du vent de la bile noire elle-même. La bile noire est envisagée seule, elle l’est d’ailleurs comme un reste, un résidu, un dépôt dans un endroit précis du corps, de ce qui n’est pas cuit, la digestion étant envisagée comme cuisson. Or, il est question de digestion dans le texte, les hommes qui ne sont pas par nature mélancoliques mais souffrent à un moment d’une maladie de bile noire en sont atteints en raison d’un problème de digestion. L’adjectif perritos désigne donc ce qui est en excès, le résidu mais aussi l’exceptionnel, qui se distingue d’une norme. Au fur et à mesure du texte et de l’augmentation de quantité d’alcool absorbée, Aristote nous fait voir un grand nombre de caractères, de maladies qui sont de toutes sortes : colère, philanthropie, audace, folie, etc. Le vin commence par rendre les gens plus bavards s’ils sont secs et froids, puis, après une plus grande absorption ils deviennent audacieux dans l’action, plus tard ils peuvent devenir très violents, puis fous, mais d’autres peuvent être hébétés et demeurer tout à fait silencieux. Il y a autant d’hommes pour correspondre naturellement à chaque caractère que de caractères produits par le vin. Le mélange dépend vraiment de tout un chacun, du mélange à l’instant où on observe l’homme, et des circonstances auxquelles il doit répondre. Les maladies de la bile noire peuvent êtres des torpeurs, athymies, apathies et indolences si elle est trop froide, et des ulcères, accès de folie ou besoins sexuels intenses si elle est trop chaude. Si le mélange de la bile noire est inconstant, cette incon- |