ARTE MAG N°45. LE PROGRAMME DU 31 OCTOBRE AU 6 NOVEMBRE 2020 8 Beyoncé Femmes puissantes Zahia Dehar Roxane Gay Beyoncé Depuis ses débuts avec les Destiny’s Child à la fin des années 1990, « Queen Bey » déchaîne les foules avec ses performances hors norme et ses tubes à succès comme « Run the world », repris dans les cortèges des manifestations féministes. Le poing levé et en tenue sexy, la star américaine y proclame la puissance du féminin. Si ce Girl Power revendiqué représente pour certains un argument marketing destiné à faire vendre, pour d’autres, il porte haut et démocratise le combat pour les droits des femmes. Dans son titre « Flawless », issu d’un cinquième album sorti en 2013, la chanteuse n’hésite pas à se taire pour laisser place au message de l’écrivaine nigériane Chimamanda Ngozi Adichie, auteure du manifeste « We Should All be Feminists (« Nous devrions tous être des féministes »). Zahia Dehar En 2010, alors qu’elle est encore mineure, ses relations tarifées avec des footballeurs font la une des médias. Dix ans plus tard, la scandaleuse Zahia est invitée dans les défilés de haute couture en tant que créatrice de mode et fait ses premiers pas très applaudis au cinéma dans Une fille facile de Rebecca Zlotowski, conte sensuel et subtil sorti en mai 2019. Acquise grâce à la prostitution, sa réussite divise dans les rangs des féministes. Où commence et où s’arrête la libre disposition de son propre corps ? Pour l’ex-escort girl, « échanger du sexe contre du luxe » serait une manière de prendre le pouvoir et de s’émanciper. La jeune femme prend en exemple les courtisanes du XIX e siècle, ces « demi-mondaines » qui, contrairement aux femmes de la bonne société, jouissent alors du droit de posséder un compte en banque et de gérer leurs biens sans tutelle masculine. Roxane Gay Fameuse en son pays, les États-Unis, notamment grâce à son livre Bad Feminist paru en 2014, Roxane Gay est devenue en 2016 la première femme noire publiée par Marvel Comics, où elle a cosigné World of Wakanda. Obèse et bisexuelle, l’écrivaine passionnée de pop culture défend un féminisme Dans un documentaire foisonnant, Élise Baudoin et Ariel Wizman dessinent les contours du nouveau féminisme au travers de ses figures de proue consacrées par la pop culture. Portrait de trois de ces égéries, dont les postures suscitent de vifs débats. « intersectionnel », c’est-à-dire inclusif, tourné vers les minorités et soucieux de justice sociale. « Dans l’histoire, le féminisme s’est concentré sur les femmes blanches hétérosexuelles de la classe moyenne dont le corps correspondait à la norme, au détriment des autres », résume-telle. Affirmant son goût pour le hip-hop (« tout en sachant que les femmes y sont rabaissées ») comme pour les comédies romantiques (« même si elles véhiculent une fausse idée de l’amour ») , cette professeure d’université, « bordélique » parce qu’« humaine », a l’art de désarçonner les certitudes. Hélène Porret Vendredi 6 novembre à 22.45 Pop féminisme Lire page 25 i 30/10 4/1/2021 |