( Pleins feux sur… LA BIBLIOTHÈQUE DU SERVICE HISTORIQUE DE LA DÉFENSE ) Le Service historique de la Défense est l’héritier d’institutions remontant au XVII e siècle. La bibliothèque du Service historique de la Défense l’ héritiers de « dépôts » remontant à la fin L’histoire militaire constitue l’un des patrimoines communs le plus partagé au niveau national. La grande collecte menée en 2014 à l’occasion du centenaire de la guerre 14 -18 a témoigné de leur importance, montrant que chaque famille, souvent chaque individu, chaque personne morale, ville ou institution a été marqué par le fait militaire ou guerrier. C’est dire si l’étendue du champ documentaire de sa production est large. Parmi les institutions qui en ont la charge, le Service historique de la Défense (SHD) est original à plus d’un titre. Si sa création ne date que de 2005, il succède à des services historiques par armées (Terre, Marine, Air et Gendarmerie nationale), eux-mêmes 26 Ar (abes)ques N°98 JUILLET-AOÛT-SEPTEMBRE 2020 du XVII e siècle. Aujourd’hui réparti sur dix sites en France métropolitaine, le SHD est toujours le service d’archives définitives du ministère des Armées. À cette fonction s’ajoutent celles d’un centre de recherche en histoire militaire et de gestion de la symbolique de la défense (drapeaux et emblèmes, insignes, noms de casernements et de promotions), ainsi que celle de première bibliothèque d’Europe en histoire militaire. UNE BIBLIOTHÈQUE D’ORIGINE ROYALE Dès 1688, Louis XIV confiait à Louvois le soin de créer un Dépôt général de la Guerre, où seraient conservés les documents liés à ce domaine régalien par excellence, qu’il s’agisse des archives produites par l’institution ou des moyens d’éclairer et de former le personnel militaire et l’entourage du roi. Ainsi, dès sa création, suivie en 1699 par celle du Dépôt de la Marine, le Dépôt général UN GISEMENT DOCUMENTAIRE POUR LA ROYALE La bibliothèque du SHD conserve un ensemble remarquable de cartes et plans dont se détache particulièrement la collection dite « des 71 recueils ». Elle tire son nom de l’opération effectuée vers 1860 au sein du Dépôt des cartes et plans de la Marine : près de 6 500 cartes maritimes et terrestres, manuscrites ou imprimées de tous pays, réalisées entre 1550 et 1850, ont été rassemblées par grands lots géographiques et thématiques et collées sur des feuilles de papier reliées dans 71 imposants volumes. Les deux premiers volumes se composent de mappemondes, puis une vingtaine d’autres sont consacrés à la France ; les autres pays européens occupent 35 registres, tandis que l’Asie, l’Afrique et l’Amérique se partagent la quinzaine de recueils subsistants. Il faut noter l’absence de cartes sur l’Océanie et les pôles, qui s’explique par la méconnaissance de ces contrées avant le XIX e siècle. Si la plupart des recueils sont majoritairement composés de cartes terrestres (plans de villes et de fortifications, projets d’urbanisme), d’autres présentent un intérêt pour l’histoire maritime : les côtes, les cours d’eau ou les forêts essentielles pour la construction navale sont fréquemment représentés, et les traces des voyages et des explorations s’affirment dans les cartes extra-européennes, surtout dans le continent américain. Le caractère unique de la collection est renforcé par les mentions manuscrites, écrites ou dessinées, présentes sur un très grand nombre de cartes. Des pistes de recherche passionnantes restent donc ouvertes sur le décryptage de toutes ces annotations. Si la collection est à la disposition du public, ses richesses sont encore à exploiter et surtout à faire connaître. Sylvie Legrosse Bibliothèque du Service historique de la Défense - Gestionnaire de collections de livres anciens et manuscrits sylvie.legrosse@intradef.gouv.fr de la Guerre s’enrichit d’ouvrages imprimés et manuscrits. Beaucoup correspondent à l’essor des armes dites savantes (génie, artillerie), qui requiert des compétences multiples telles que la géométrie, la balistique ou encore la poliorcétique, complétant les récits de guerres et de campagnes militaires. Parallèlement, le Dépôt de la Marine développe d’importantes collections, notamment de traités de navigation ou de construction de bateaux, ainsi que de documents cartographiques, dont l’exceptionnel ensemble dit « des 71 recueils ». C’est la défaite de 1870 qui, paradoxalement, permet le développement le plus vif de la collection. La préparation de la revanche engendre de nombreuses publications, et l’état-major acquiert largement, y compris en langues étrangères. Mais c’est aux lendemains de la Grande Guerre que les bibliothèques prennent une nouvelle ampleur. Sous l’Occupation, une partie des collections sont pillées, mais l’essentiel est préservé par des opérations de déplacement des documents, dont certains sont cachés. Ainsi, malgré des pertes, beaucoup de documents d’exception sont parvenus jusqu’à nous. Enfin, en 2005, est créé le SHD. La fusion des quatre services préexistants entraîne celle des quatre bibliothèques, permettant la constitution d’un ensemble documentaire et patrimonial exceptionnel. UNE COLLECTION À L’ÉCHELLE DE L’HISTOIRE DE LA GUERRE ET DU FAIT MILITAIRE Les bibliothèques ne sont souvent pas à un paradoxe près dans leur histoire et celle de la constitution de leurs fonds, et la bibliothèque du SHD n’échappe pas à la règle. Ainsi, si elle conserve plusieurs milliers de manuscrits relatifs au fait et à « l’art » militaires, le document le plus ancien est un fragment des homélies de Saint Grégoire de Nazianze, très probablement issu des confiscations révolutionnaires. Si les modalités d’enrichissement des collections de la bibliothèque sont aujourd’hui moins radicales, elles continuent pour autant à permettre le |